Interview : Christian Vaast
|
Christian Vaast
:
Les fondamentaux du cyclisme |
Pour
aider les sportifs à « mieux concevoir leur propre
vie sportive », Christian Vaast, cycliste et entraîneur
confirmé, nous dévoile dans son livre, les fondamentaux
du cyclisme, les neuf thèmes relatifs au cyclisme,
au cyclosport et au cyclotourisme. Allant du réglage
du vélo… à la diététique,
les plus grands noms n’hésitent à pas
jeter un coup d’œil dans cette véritable
bible du cyclisme. Actuellement entraîneur cycliste
, cet ingénieur de formation confie pour la Librairie-du-sport
les motivations qui l’ont poussé à se
lancer dans l’écriture et revient sur ses débuts
avec la petite reine… |
- En savoir plus
sur le nouveau livre de Christian Vaast [Cliquez
ici]
- Lire quelques citations extraite de son livre [Cliquez ici]
L.S |
Comment vous est venue votre passion pour le
cyclisme ? |
C.V. |
En
fait, je suis né dans un milieu cycliste. Tous mes
oncles ont fait du vélo et, enfant, je les regardais
avec beaucoup d’admiration car leurs performances étaient
loin d’être négligeables. Plusieurs ont
été à leur époque champion des
Flandres ; j’en ai même un qui est devenu champion
de France professionnel en 1948. Le dimanche, dans la maison
de mes grands-parents, il y avait toujours un ou deux bouquets.
Comme je suis d’origine polonaise par ma mère,
régulièrement, mes oncles participaient au tour
de Pologne. J’ai donc eu très jeune le goût
du cyclisme. Comme je suis naturellement porté vers
tout ce qui est technique, j’ai cherché très
vite, à développer mes connaissances sur la
mécanique du vélo.
J’ai toujours aimé le sport ; j’ai même
pratiqué le judo jusqu’à l’obtention
de la ceinture noire. Au moment de choisir ma profession,
j’ai longtemps hésité entre devenir professeur
de sport, ou être ingénieur. J’ai choisi
d’être ingénieur et j’ai même
poursuivi par une thèse de Docteur Ingénieur.
Mais je n’ai jamais occulter ma passion pour le sport.
Pour m’améliorer dans le cyclisme, j’ai
cherché et recherché comment faire pour devenir
toujours plus performant. Ce qui m’a conduit à
prendre durant des années toute une série de
notes qui m’ont amenées au présent livre.
|
L.S
|
Vous
avez été coureur cycliste, vous souvenez-vous
de votre première compétition ? |
C.V. |
Oui,
absolument ! J’ai commencé les courses à
18 ans, ma mère souhaitait que j’obtienne le
bac avant de m’autoriser à pratiquer la compétition.
Je venais juste de finir de lire le livre de Jean Bobet, La
course en tête, un excellent livre de l’époque.
J’y ai vu une démarche logique et scientifique
qui me convenait tout à fait. Cette première
course a eu lieu à Arras. Jean Bobet expliquait dans
son livre comment s’alimenter. Je n’avais probablement
pas tout compris, mais j’ai cru suivre à la lettre
ses prescriptions. J’avais préparé un
bidon avec à l’intérieur un peu de riz.
Le riz a gonflé et je n’ai rien pu avaler. J’ai
bien sûr été « lâché
». En rentrant, j’étais tellement fatigué
que je ne me suis pas lavé avant de me coucher. La
nuit, les effets du « Dolpic » ont été
tels que j’ai rêvé que je continuai à
pédaler en enfer. Je voyais des vélos passer
à droite, à gauche, partout. Le parfait cauchemar
du cycliste. J’ai refait la même course l’année
suivante ; j’ai fait partie des échappées
et j’ai finalement terminé dans les dix premiers.
J’avais progressé. J’ai toujours été
persuadé que l’on n’exploitait pas assez
son potentiel et qu’en travaillant intelligemment, on
pouvait s’améliorer et devenir meilleur que d’autres
naturellement plus doués. |
L.S
|
Quels
ont été les moments forts de votre carrière
? |
C.V. |
Je
n’ai pas eu une carrière cycliste exceptionnelle.
Mon premier objectif était de réussir mes examens.
J’avais toujours peur de la chute, qui m’aurait
obligé à « repiquer » une année.
Boursier et aîné de cinq enfants, je ne pouvais
me le permettre. J’ai eu quelques belles expériences.
Je me souviens d’une échappée solitaire
pendant plus de 40 km devant le peloton, le motard de gendarmerie
ouvrant la route et le speaker annonçant tour après
tour « un homme toujours seul en tête… »
; je me souviens aussi de ces moments de préparation
avant la compétition, dans le café du village
organisateur, où chaque coureur refaisait la course
du dimanche précédent expliquant que «
si çà s’était passé autrement,
il aurait à coup sûr gagné… ».
Tout cela dans une forte odeur d’embrocations. Beaucoup
d’émotions fortes restent présentes en
moi ! |
L.S |
Vous
êtes actuellement entraîneur à la Chérizienne,
quelle serait la principale recommandation que vous feriez
à un cycliste débutant, et à un professionnel
? |
C.V. |
En
général j’attends toujours que le coureur
fasse la démarche de venir me voir pour discuter. Nous
parlons alors de ses objectifs pour l’année,
de son plan d’entraînement et de tout ce qu’il
peut faire pour progresser. La première question que
je pose est « pourquoi veux-tu faire du vélo
? » ; après je lui demande ce qu’il fera
s’il ne devient pas un champion. Les chances sont réellement
minces pour qu’un jeune, même doué, passe
professionnel. Devenir professionnel, c’est «
la cerise sur le gâteau »… une cerise avec
un bien gros noyau. J’essaye alors de lui expliquer
que le sport cycliste c’est bien plus que« gagner
des courses ». C’est bien plus profond ; c’est
une véritable école de vie. Dans ce sport merveilleux,
il y a la machine qui décuple l’effort humain
et toute erreur se paye au prix fort. J’observe toujours
comment le jeune coureur regarde son vélo et dans sa
façon de « l’admirer », de le «
chouchouter »,je vois tout de suite l’intérêt
qu’il peut lui porter. Le vélo c’est primordial
; on risque sa vie dessus.
Pour tous les très jeunes qui débutent, il est
vivement conseillé de passer par une école de
cyclisme. L’essentiel pour eux est de développer
la coordination neuro-musculaire. A 12 ans, une grande partie
du système cérébral est déjà
formé. Chez l’enfant, il faut multiplier les
expériences qui permettront de mieux construire les
circuits nerveux. Un peu à la manière d’un
ordinateur vierge de tout programme, le système nerveux
de l’enfant a besoin d’être « initialisé
». Malheureusement, trop souvent, dans les écoles
de cyclisme seul compte « la gagne ». La pression
est alors très forte. Les jeunes se battent pour devenir
des champions et chaque compétition est vue comme une
participation à des jeux olympiques. A cet âge
là, çà n’a pas de sens. Au jeune
cycliste il faut aussi donner une vision « culturelle
» du sport cycliste pour mieux le construire. Ainsi
il sera armé pour aborder la vie. Il faut aussi le
laisser s’amuser. Le sport est d’abord un jeu
; un jeu éducatif.
|
Suite >>
|